Lisa Miquet est photographe indépendante. Son truc à elle, c’est le portrait. Elle capte des clichés tous plus vibrants et authentiques les uns que les autres. Angèle, Pomme, Clara Luciani, Billie Eilish et même François Hollande sont passés derrière son objectif. Je vous emmène avec moi à sa rencontre !
© Milena Delorme
Lise : Hello Lisa, peux-tu me raconter ton parcours ?
Lisa : C’est un vaste truc ! (rire) Je vais essayer d’être synthétique ! Je m’appelle Lisa Miquet, j’ai 28 ans et je suis photographe depuis quelques années à Paris. À la base, je viens d’un tout petit village qui est plutôt un lieu-dit dans Lin, vraiment éloigné du microcosme des médias parisiens!
Niveau étude, j’ai tenté le concours pour Science po sans vraiment d’espoir et j’ai été prise à Science po Grenoble avec un but de travailler dans les industries créatives et culturelles. Je voulais m’assurer une sécurité dans un domaine culturel qui m’intéressait. Pendant ces 2 années, j’ai fait pas mal de stages dans des sociétés de production dont TF1 et France Télévisons. Dans toutes mes missions, je m’arrangeais toujours pour aller capter des images sur les plateaux ou en coulisses ! Après un passage par la Télévision, je me suis tournée vers les médias web. J’ai travaillé chez Madmoizelle et Kombini.
Chez Kombini, je faisais des reportages photos en pige. Lorsqu’ils ont lancé Cheese, un média dédié à la photographie, ils ont directement pensé à moi. Je suis donc rentrée chez Kombini en tant que journaliste. Je parlais de photographie mais n’étais pas censée en faire. J’avais remarqué que tous les jours, des artistes ou personnalités passaient à la rédaction sans que personne ne les photographie. J’ai alors commencé à faire des portraits d’artistes. C’est ensuite devenu une habitude. J’ai également crée une rubrique dans laquelle j’allais dans les coulisses de concerts. Petit à petit, je me suis fait ma place. J’ai nourri un book qui a été, au bout d’un moment, assez étoffé pour voler de mes propres ailes en freelance.
En parallèle, j’ai gagné le concours Mission planète + lancé par le groupe Canal+. Ils étaient à la recherche de leur nouveau reporter pour partir à l’étranger. J’ai envoyé ma candidature un dimanche soir en culotte avec une boîte de chips et peu d’espoir que ce projet aboutisse ! (rire) De sélection en sélection, mon projet leur a plu. J’ai été lauréate du concours et j’ai pu donc partir pendant 3 mois au Liban faire la série de documentaires que j’avais en tête.
Clara Luciani par © Lisa Miquet
Lise : Tu me parlais de ton reportage pour Planète +, peux-tu m’en dire plus ? Quelle était la thématique ? Combien de temps a duré ton projet ?
L. : Pour Planète +, la thématique était l’émergence du graffiti au Liban. Je connaissais un graffeur qui m’avait racontée que ce n’était pas illégal de graffer dans les rues au Liban. C’était entre le légal et l’illégal, il y avait une sorte de vide.
La ville était encore marquée par les traces de la guerre, il y avait encore des impacts de balles dans les murs. Les graffeurs couvraient en quelque sorte ces impacts. Le street art était plutôt vu comme de l’embellissement et non de la dégradation. Toute cette scène m’intéresserait, une scène d’ailleurs assez récente de moins de 10 ans. Cette scène regroupe une vingtaine d’artistes.
Dans mon reportage, je me suis intéressée aux graffeurs libanais, à leurs spécificités et à leur cheminement pour arriver aux graffitis. Je voulais voir comment le graffiti pouvait panser les plaies d’un pays en reconstruction et effacer les traces de la guerre.
Le Liban est un pays divisé par les religions ainsi chaque quartier a sa confession : le quartier chrétien, le quartier musulman… Et ils ne se mélangent quasiment pas. Cette passion pour le graffiti permet de les unir.
J’avais seulement 8 épisodes de 3 minutes pour parler de ce vaste sujet ! Cette expérience m’a donnée confiance en moi et je me suis dit que je pouvais convaincre des chaînes, des diffuseurs, vendre mes idées, quitter mon travail, partir deux mois et demi au Liban, ce qui est déjà pas mal ! (rire)
© Lisa Miquet
Lise : Quel message veux-tu faire passer à travers ton travail ?
L. : Il n’y a pas toujours de messages précis, parfois, c’est juste capturer un instant ou essayer de retranscrire ce que j’ai vu. Par exemple, quand je suis dans les coulisses d’un artiste, j’essaye d’être une petite souris. J’essaye de capter l’univers de l’artiste. J’aime beaucoup prendre des photos de petits objets ou d’un tee-shirt qui traîne dans sa loge. J’essaye de transmettre ce que j’ai la chance de voir. Ce sont les photos qui ont le plus de visibilité. Je veux faire passer un message d’égalité et d’un monde plus inclusif.
« Le Liban est un pays divisé par les religions ainsi chaque quartier a sa confession : le quartier chrétien, le quartier musulman… Et ils ne se mélangent quasiment pas. Cette passion pour le graffiti permet de les unir. »
Lise : Quelle est ton approche pour photographier les artistes ?
L. : Je discute et rigole avec certains, on mange parfois ensemble avant. Souvent l’attaché de presse ou le manager aident à faire le lien. Parfois il y a des artistes que j’ai déjà rencontré ou interviewé chez Kombini. Dernièrement, j’ai photographié le rappeur Isha qui m’a donnée carte blanche. A contrario, j’ai eu la chance de photographier Billie Eilish mais tout était verrouillé et cadré. A un moment, on m’a dit : « C’est ton tour » et j’avais 2 minutes pour la photographier ! (rire)
Angèle par © Lisa Miquet
Lise : Te sens-tu engagée professionnellement et personnellement ?
L. : L’engagement est maintenant plus une trame de fond. Quand je suis partie à Beyrouth, c’était évident qu’il fallait qu’il y ait au moins une graffeuse et de la diversité en général. Ce n’est pas forcément le sujet mais c’est une toile de fond qui est chère à tous mes projets. J’essaye d’être la plus inclusive possible.
Lise : Sur quels projets, t’es-tu sentie sortir de ta zone de confort ?
L. : Il y a eu 2 projets : lorsque j’ai interpellé François Hollande pour faire son portrait ! J’ai clairement pris des risques pour ma carrière ! (rire) Mon projet au Liban est le second projet qui m’a fait sortir de ma zone de confort !
Lise : Quels sont tes projets pour la suite ?
L. : Je travaille sur une série documentaire mais je ne peux pas trop en parler ! Et j’ai acheté du matériel pour créer un studio chez moi donc à suivre !
Pomme par © Lisa Miquet